Jean, l'aspirant traileur : Patou Trail, Tour des Villages 10K 2017


- Doucement tu partiras, Petit Scarabée, loin tu iras, fit Coach Lolo.
- Euh… moi, c'est Jean…
- Rien ne sert de courir, partir à point il faut.
- Oui, répondit l'aspirant traileur, un peu décontenancé.
- Chi va piano, va sano.
- Euh…
- Pierre qui roule n'amasse pas mousse.
- …
- Un tien vaut mieux que deux tu l'auras.
Le vieux maître avait buggé. Jean s'éloigna doucement, le laissant au loin soliloquer dans le vide.

Jean partit à petit rythme. Tranquille. La grosse masse des coureurs était devant lui. Il était venu au Patou Trail, pour le 10km du Tour des Villages, en compagnie de sa nièce, la Mule, dont c'était le premier trail. Elle voulait découvrir le bonheur de ce sport et Jean était venu l'accompagner. C'était aussi un bon moyen de continuer sa préparation, faire quelques tests et se regonfler le moral après la déconfiture du Montan'Aspe. Du moins, il l'espérait.

La Mule partit bille en tête.
- Qui trop se hâte, en chemin reste, avait professé Coach Lolo.
L'aspirant traileur se remémorait les paroles du vieux sage. Il laissa sa nièce s'éloigner petit à petit.

Cloc-cloc ! Cloc-cloc ! Cloc-cloc ! Cloc-cloc !
La boîte remplie de biscuits faisait un bruit infernal dans la poche avant du sac de Jean. Du fond de son sauna UHT, Bébel buvait du petit lait en voyant le coureur se désespérer.

La première montée, la plus longue, débuta. Plutôt roulante, Jean alterna la course et la marche rapide, faisant très attention de ne pas se mettre dans le rouge. Rapidement, la Mule disparut.
Cloc-cloc ! Cloc-cloc !

- Doucement tu partiras, grand moral tu auras, disait Coach Lolo.
Jean remontait petit à petit les coureurs. Lui qui avait trop souvent connu les difficultés de se faire doubler constamment sans jamais rattraper personne, goûtait au plaisir de vivre l'inverse. Son moral était au beau fixe. Un grand soleil dans sa tête.

Le ciel était bien plombé. Pas grave. Le parcours était essentiellement en sous-bois et il n'offrait pas de grands panoramas. Mais il était très agréable pour courir et la pluie n'était pas au rendez-vous.
Cloc-cloc ! Cloc-cloc !

Jean passa la fin de la montée en compagnie d'un autre coureur, venu de Capvern, avec qui il discuta un moment. C'était aussi ces instants qui rendaient les courses agréables et changeaient des longues sorties en solo, une autre facette du trail qu'il appréciait également.

- Te restaurer, tu devras, avait dit le vieux sage.
Jean tenta de manger un Tuc pendant l'effort. Une bouchée. Il manqua de s'étouffer, toussa, et arrosa la piste d'un mélange de postillons et de miettes de biscuits. Façon karcher.

Deuxième bouchée. Même résultat. Il faudra revoir la technique.

Après être monté au-dessus des Granges de Lias, Jean attaqua la descente. Pas vraiment technique dans son ensemble, il se laissa aller. Décidément, il prenait de plus en plus de plaisir dans ces parties de parcours. L'entraînement finissait peut-être par porter ses fruits.
Cloc-cloc ! Cloc-cloc !

Jean rattrapa la Mule qui le reconnut au son de ses biscuits. Capot ouvert, le moteur sifflait dans tous les sens à en perdre haleine.
- Laisse-moi ici, fit-elle dans un moment de bravoure. Tu peux plus rien pour moi, je vais te ralentir !
- Non, on finira ensemble ! s'écria l'aspirant traileur. Je ne te laisserai pas tomber !
- Hé, oh ! Ça va ! J'vais pas crever, non plus.
- …
Jean accéléra, laissant la Mule derrière lui descendre à son propre rythme.
Cloc-cloc ! Cloc-cloc !

Le ravitaillement.
- 1 verre moitié soda, moitié eau gazeuse, ça passe bien, lui avait conseillé Namasté après le terrible Montan'Aspe.
Accoudé au comptoir, l'aspirant traileur commanda sa boisson que la bénévole-barmaid lui servit avec un sourire. Jean passa au verdâtre. Dans le genre sévèrement affreux, le cocktail avait une bonne tête de vainqueur. Fallait vraiment que ça soit efficace. Il attendit la Mule, afin d'attaquer la seconde et dernière difficulté ensemble. Elle arriva rapidement. Ils repartirent ensemble.
Cloc-cloc! Cloc-cloc !

Le début de la montée était roulant, puis arriva un mur. Bref mais bien casse-pattes. La Mule suivait, au mental. Arrivés en haut, il fallait maintenant redescendre.
- Un peu con, ce sport, fit Bébel dégustant son mojito et qui ne ratait rien de la course.

- Le podium, jamais tu n'auras, le plaisir tu chercheras, avait asséné Coach Lolo.
Jean termina la course avec la Mule. Ils firent la descente en compagnie d'un concurrent sympathique venu du grand nord, la Gironde. Discussion agréable, moment d'échange. Ils entamèrent la dernière partie, dans le village. De nombreux spectateurs étaient présents le long de la ligne droite au centre de Saint-Lary-Soulan et qui menait à l'arrivée. Un petit bonheur de fin de course au milieu des applaudissements.
Cloc-cloc !
Le dernier ! Délivrance !

Les trois coureurs franchirent ensemble la ligne, la Mule finissant même quatrième féminine. Une bien belle course pour une première.

Jean retrouva le Rameau et la Brindille qui avaient participé au 18km du Tour des Villages et avaient couru ensemble. La Brindille était sur le podium, comme à son habitude, juste derrière une coureuse impressionnante et qui jouait à domicile.
- A bientôt ! fit le Rameau. Moi, je vais me faire un petit 1000m de dénivelé positif en rentrant à la maison, histoire de décrasser le moteur.
- Ah… ok… répondit Jean. Euh… moi, je vais me faire une petite montée de mon lit, histoire de faire une bonne sieste.
Heureux de sa course, en pleine forme, Jean avait retrouvé un gros moral pour la suite de sa saison.

- A l'arrivée, une bière tu boiras.
- Mais je ne bois pas d'alcool, avait répondu Jean.
- Je ne peux rien lui apprendre, ce jeune padawan n'est pas prêt, s'était désespéré Coach Lolo.

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